Grands Cristaux sur Porcelaine

 

 

GLAÇURES SANS CATCHERS :
 
 
 
Aller vers une maîtrise des écoulements des glaçures cristallines
  Les glaçures cristallines sont réputées pour produire de forts écoulements lors du pic à haute température destiné à anéantir les traces de matières cristallines présentes dans la couche de glaçure fondue, ce qui ne facilite pas la production des vases et autres pièces verticales. Dans ces conditions l'emploi de catchers et d'engobes protecteurs sont nécessaires, mais il reste toujours des risques de collages et l'incertitude de récupérer les pièces dans leur entier demeure jusqu'au dernier moment lors des meulages et tentatives de séparation des parties collées.
 
Plusieurs techniques sont souvent combinées pour permettre la récupération des pièces sur leurs catchers (engobes alumineux sur les pieds, choc thermique local, découpage au disque diamanté, meulages de finition, etc...).
 
Cette étape de la production de pièces à glaçures cristallines est la plus redoutée des céramistes.
 
"Cuire sans catcher" est le souhait le plus cher de tous ceux qui s'adonnent à cette passion.
 
 
 
Autre regard sur l'état liquide :
 
  
Extraits du cours-conférence de J. Peyssou*
sur la Fusion - Dissolution - Recristallisation (mars 1971) :
 
" Un liquide est formé de particules (atomes, molécules, ions) relativement libres de se déplacer les unes par rapport aux autres, ce qui produit une fluidité. Les rayons X permettent, par diffraction, de déceler que, loin du point critique**, les molécules semblent groupées en amas de quelques unités à plusieurs millions d'unités et qu'entre ces amas subsistent des vides… L'arrangement des molécules dans les amas est relativement régulier et rappelle la structure du réseau du solide "
 
" Au contraire, au voisinage de la température critique, les rayons X ne décèlent aucun ordre périodique, c'est à dire une interaction nulle des molécules entre elles et un désordre total "
 
" De ce qui vient d'être dit, un liquide apparaît, selon la température où on l'observe comme le passage progressif d'une structure voisine de celle du solide à une structure voisine de celle d'un gaz. "
* J. Peyssou, Directeur de l'Ecole Nationale Supérieure de Céramique Industrielle (ENSCI) de Sèvres en 1971.
** Le point critique d'un fluide est un point au-delà duquel on ne peut plus distinguer la phase liquide de la phase vapeur. Cette valeur dépend de la pression et de la température.
 
 
 
Ces extraits contiennent l'essentiel de ce qu'il faut retenir pour bien comprendre le mécanisme de cuisson utilisé pour les glaçures cristallines :
 
Le premier considère un liquide juste fondu très loin de son passage à l'état gazeux. Celui-ci est encore constitué d'amas mobiles plus ou moins importants ayant conservé des structures proches de l'état solide. Dans des conditions similaires d'état de fusion, une glaçure cristalline soumise à un refroidissement lent ou à un palier peut aisément amorcer un nombre incalculable de germes cristallins (des milliers, des millions…) à partir des très nombreux morceaux de structures cristallines encore présents dans cette phase peu avancée de l'état liquide…
 
Hors, pour les glaçures cristallines l'effet recherché consiste à produire un petit nombre de germes à partir d'un mélange fondu riche en éléments aptes à la construction des cristaux…
 
La suite de ces extraits indique la destruction progressive des amas ordonnés avec la montée température et leur totale disparition à l'approche du passage à l'état gazeux…
 
Sans aller jusqu'à cet extrême, le fait de pousser la température de cuisson d'une glaçure pour l'amener au-delà de son état liquide ordinaire permet de réduire fortement les résidus de structures ordonnées. C'est le principe utilisé avec les glaçures cristallines, pour raréfier et inhiber en grande partie les possibilités de germination lors du refroidissement. Ainsi, la température de cuisson d'une glaçure cristalline est toujours poussée au-delà de celle qui lui permettrait un état de vitrification ordinaire. Un dépassement de 100 à 200°C est courant.
Oeuf sur son catcher après cuisson
 
 

 

Catchers après utilisation, remplis d'écoulements de glaçures
 
 
Pied endomagé lors du décollement du catcher
 
 
Autre exemple de pied arraché
Se passer de catchers... enfin !!

 

Puisqu'il faut passer par cette étape incontournable de la haute température pour raréfier les reliquats de structures cristallines et parvenir à des développement cristallins en nombre raisonnable dans mes glaçures cuites à cône 8, j'ai procédé à différents essais visant à réduire les risques d'écoulement.

 
Les axes expérimentés :
 
- L'épaisseur de glaçure (poids déposé)
- La viscosité de la glaçure
- La rapidité de la cuisson avant et après le pic à haute température
- Le temps donné à la formation des cristaux lors de la phase de croissance
 
L'épaisseur de glaçure :
 
Depuis mes débuts dans les glaçures cristallines j'ai recherché la reproductibilité de mes glaçures sur mes pièces. Toutes mes glaçures sont préparées avec un rapport précis "eau / agents rhéologiques / matières" pour chacune d'entre elles, ce qui me permets de travailler par pesée pour contrôler la quantité de glaçure déposée sur chaque type de pièce (l'application étant toujours faite par nébulisation). J'ai cherché à voir si je pouvais réduire ces quantités sans nuire à l'aspect de la glaçure finale. Quelques gains intéressant ont pu être faits, mais pas suffisants pour se passer de catcher.
 
La viscosité de la glaçure :
 
Ce point est le plus important. J'ai pu constater que si une glaçure reste assez visqueuse à très haute température le résultat de cristallisation final est quasi-identique à celui d'une glaçure qui coule en prenant le soin de rééquilibrer le zinc et le calcium dans mes formules. Les éléments qui permettent d'augmenter la viscosité sont la silice, l'alumine, l'absence de titane et la présence de baryum tout en favorisant le potassium au détriment du sodium au niveau des oxydes alcalins. Toutes mes glaçures ainsi composées (mates ou brillantes) contiennent entre 60% et 65% de silice (% molaire), entre 3% et 6% d'alumine (% molaire) et entre 2% à 10% de baryum (% molaire).
 
La rapidité de la cuisson avant et après le pic à haute température :
 
Avec des compositions de glaçures visqueuses ces paramètres deviennent moins importants. L'interaction de la glaçure avec le tesson est fortement ralentie par la haute viscosité de la glaçure. C'est même très appréciable car cela permet de prolonger l'utilisation des éléments chauffants vieillis de mon four et faire 30 ou 40 cuissons de plus sans nuire à mes glaçures
 
Le temps donné à la formation des cristaux lors de la phase de croissance :
 
Bien évidemment cette viscosité qui empêche l'écoulement freine aussi la croissance cristalline. Dans ce cas l'allongement des paliers de croissance permet de compenser cet effet.
J'y gagne sur la qualité de mes cristaux car un développement plus lent crée des cristaux plus épais et plus denses en structure et en couleur.
 
 
Résultats :
 
Mes résultats les plus spectaculaires sont ceux obtenus avec mes glaçures brillantes "Bleu de fer", "Ébène" et mes glaçures mates. Le risque d'écoulement est tout simplement réduit à zéro avec ces deux types de glaçures. Cette performance est aussi due au fait que ces deux glaçures nécessitent plus de la moitié de poids en moins sur les pièces par rapport aux autres glaçures.
 
Plus de viscosité et beaucoup moins d'épaisseur sont les principes gagnants de cette démarche.
 
Les glaçures "Rouge de Rouge" et "Canari" fonctionnent aussi très bien, mais il faut être très vigilant de ne pas dépasser le poids à déposer car pour ces deux glaçures le poids de glaçures n'a pu être réduit et reste assez élevé.
 
Au final, plus besoin de catchers pour ces glaçures, plus de décollages fastidieux et risqués, plus de meulages. Gain de temps, gain de qualité et soucis en moins...
 
 
Denis Caraty / Janvier 2011
 
Vase côtelé couvert - Glaçure Bleu de Fer
Cuisson oxydante à cône 8 en four électrique sans catcher
 
 
 

 

 

 

 

Vase balustre " Delft " - Glaçure Ébène vert
Cuisson oxydante à cône 8 en four électrique sans catcher
 

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Pieds de pièces avec glaçures visqueuses - Cuisson oxydante à cône 8 sans catcher

 
 
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